L’oeil du diable

Ouille ouille ouille! Voilà une randonnée qui vous donne froid dans le dos! Non seulement par le nom de sa destination, mais également par la technique qu’elle demande.

Nous nous sommes récemment rendus au Capu Tafunatu avant de gravir la Paglia Orba. Si l’on entend souvent que le premier est le plus difficile, la seconde est loin d’être facile d’accès…

Après une soirée bien arrosée au col de Vergio (habitude oblige), nous avons pris le chemin du refuge de Ciuttulu di i Mori. La promenade est ravissante et sans difficultés. En à peine une heure, on profite d’une vue magnifique sur le Tafunatu et la Paglia Orba, qui se font face.

Une fois au refuge (à 1991 mètres), les ennuis commencent! Adieux la végétation, bonjour les pierres glissantes. Nous laissons les sacs au col des Maures pour commencer l’ascension du Capu Tafunatu, qui culmine à 2335 mètres. Prudents, nous avançons doucement. Le chemin est abrupt et nous offre quelques frayeurs. L’arrivée dans l’oeil du diable, ainsi nommé par la légende, nous rassure (c’est finit, on escalade plus!) et nous époustoufle!

Le trou du Tafunatu fait pas moins de 35 mètres de large sur une dizaine de haut. Autant vous dire, qu’on se sent tout petit à l’intérieur.

Mais ce n’est pas finit! Il faut repartir si nous voulons rejoindre la Paglia Orba avant l’heure du déjeuner. Encore une frayeur dans la descente et nous récupérons (enfin) les sacs à dos. Pfiou, nous avons réussis sans embuches! Comme dirait Dora l’exploratrice: «C’est gagné, c’est gagné, we did it! Yeah!»

Tranquillement nous suivons donc les cairns en direction de la Paglia. Le chemin s’élève rapidement et commence à devenir difficile d’accès. Nous apercevons les cairns mais il est parfois trop dur de deviner le chemin à emprunter! Quelques moments d’escalades nous offrent de magnifiques panoramas mais… les pieds au bord de la falaise!

Surprise! Sortie de nul part, une mouflonne nous surprend à seulement quelques mètres devant nous. Elle hésite un moment puis escalade la falaise avant de disparaître dans les rochers. Simplement magnifique!

Après quelques efforts nous arrivons au sommet de la Paglia Orba à 2525 mètres d’altitude. La récompense est là! Certainement une des plus belles vues de toute la Corse. Mais nous n’en profiterons que quelques instants. Nous sommes en retard sur l’itinéraire prévu. Le temps de manger et de finir la bouteille de rosé et nous voilà repartis en direction du refuge, par un autre itinéraire cette fois-ci, que nous pensons plus simple d’accès.

Que nous pensons seulement… car voilà, un passage nécessite un peu d’escalade à l’aide d’une corde (qui est présente sur place). C’est donc à la force des bras que nous descendons chacun notre tour le long de la paroi dans un goulet… Plus de peur que de mal! Le retour s’est fait tranquillement.

Finalement, nous avons passés une journée exceptionnelle, même si nous avons tous droit à un caleçon tout neuf!

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Sur le toit de la Corse

Et voilà, mauvaise nouvelle… je ne pourrais plus monter plus haut en Corse… nous avons foulé le monte Cintu, le plus haut sommet de Corse qui culmine à 2706 mètres.

Alors si ce n’est pas le plus beau, aussi bien pour son ascension que pour la vue qu’il nous offre, il a tout de même ce mérite ci, celui d’être le point culminant de l’île. Et ainsi d’offrir une certaine fierté à tous ceux qui s’y aventurent!

Imaginez en soirée l’impact qu’aurait un lâché de «j’ai fais le cintu, moi» sur toutes les demoiselles environnantes… bon ok… à peut près aucun, mais pour un randonneur, monter au sommet, c’est juste le pied!

Si l’ascension est, comme je le disais plus haut, loin d’être folichonne, elle reste tout de même en mémoire. C’est raide, c’est lunaire et c’est dur!

Nous avons choisi de nous attaquer au «saint des saints des sommets» depuis Lozzi dans le Niolu. (Il existe un autre passage par la vallée de l’Asco). Notre petit groupe a donc passé une nuit bien arrosée, histoire de se remplir de globules rosés, au camping le “Monte Cintu”, dit le bien nommé.

Bon, c’est vrai, on a un peu triché… À l’aube le 4×4 nous a permis de rejoindre le refuge de Petra Pinzuta (en ruine) en 45 minutes au lieu de l’heure et demie de marche annoncée. C’est toujours ça de gagné.

(Edit 2017 : la piste est devenue agricole et nécessite une autorisation pour l’utiliser. Vous pouvez vous rapprocher de la mairie ou de l’AFP de Lozzi.)

Timide mais tout de même impatient, notre groupe s’est lancé sur le sentier (d’abord dans la mauvaise direction…), prêt à en découdre avec les dénivelés et les kilomètres. En une vingtaine de minutes nous voilà au refuge de l’Ercu, où à cette heure, les pensionnaires de la nuit ouvrent tout juste l’œil.

C’est là que commencent les ennuis. C’est parti pour l’ascension et c’est le cas de le dire! En une heure nous grimpons 600 mètres sur les 1300 annoncés, au milieu d’un pierrier glissant où la végétation est simplement inexistante.

Rapidement le paysage devient lunaire. Chaque virage nous amène un nouveau mur à gravir. Et je pèse mes mots. Il faut très souvent se servir de ses deux mains pour grimper et très souvent s’arrêter pour jeter un coup d’oeil en arrière afin de se remémorer à quoi ressemble un brin d’herbe. Ou plutôt pour admirer le lac de Calacuccia, que le soleil dévoile au fil de son lever. Les sommets alentours apparaissent également petit à petit.

En quelques heures nous arrivons au sommet. Fatigués mais surtout pressés d’ouvrir le rosé avant qu’il ne soit trop chaud. Sur notre gauche la Paglia Orba s’élève et nous ne sommes pas encore descendus que nous planifions déjà son ascension prochaine.

Au pied de la croix qui marque le sommet, on aperçoit la Revellata et Calvi. Plus près, on voit les restes du lac d’Argentu et la vallée de l’Asco ainsi que l’ancienne station de ski. La vue est belle mais moins panoramique que sur le monte Rotondu et… Ah mais, c’est déjà l’heure du pique nique! À TABLE!!!

Pour le retour, nous choisissons de suivre le sentier qui rejoint le lac du Cintu afin de faire une boucle, c’est plus sympa. Si vous aimez le surf, alors vous serez servis! Pour descendre il suffit de sauter de tas de pierres en tas de pierres en vous laissant glisser. Attention, celui qui tombe a perdu! Bref, randonneur débutant s’abstenir!

Le lac du Cintu, d’un bleu étrangement beau et à l’ombre d’une énorme falaise, semble perdu au milieu d’un cratère de pierres de toutes tailles. La surface est calme et on ne la brouillera que pour en goûter la fraîcheur du bout des doigts afin de ne pas trop en fragiliser d’avantage l’écosystème.

La deuxième partie de la descente se fait plus facilement, en suivant les cairns on rejoint rapidement un sentier visible qui mène droit au refuge de l’Ercu.

Très belle surprise en chemin, trois mouflons sont sortis du maquis pour nous faire admirer leurs cornes et leurs prouesses à l’escalade… un souvenir qui nous restera!

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Baignade à la Scala

Panneau au départ

L’été la tendance est plutôt farniente sur la plage ou sur la terrasse de la maison. Mais parfois, quand on a déjà passé un mois à bronzer aux mêmes endroits et bien on en cherche de nouveaux. Et le fruit de cette réflexion vient un peu comme ça : « Hum, et si j’allais rien faire là-bas ! ». Non loin du chat des sketchs de Gad Elmaleh.

Au mois d’août, j’ai ainsi pris la direction de la Scala di Santa Regina, dans le Niolu, pour une après-midi farniente aux bords des vasques de la rivière. Ces magnifiques gorges, aux airs de « petits canyons » américains, sont aujourd’hui praticables en voiture, mais à une certaine époque, seul un petit chemin muletier permettait de les traverser d’un bout à l’autre. Pour ne pas avoir mauvaise conscience d’avoir fait une heure de route juste pour faire bronzette, j’avais prévu de quoi marcher un peu et ne pas me baigner en bord de route.

Quand je dis « marcher un peu », je pèse mes mots… Une petite heure à peine sur le chemin qui surplombe la route, et la rivière encore plus bas, et me voilà arrivé à un magnifique pont génois au pied des escaliers de l’Ancienne Scala (comprendre l’ancien chemin creusé dans la montagne). A première vue, je suis seul, je savoure l’instant et m’installe tranquillement. Mais le profit est de courte de durée. Mr Bidochon, sa femme et ses trois gosses ont pensé que j’avais quand même trouvé l’endroit idéal pour poser sa serviette. Délicatement, pour ne pas TROP me sortir de mon sommeil mimé (technique accrue d’auto-défense), ils sont venus poser leurs affaires à un petit mètre de moi. Bien sûr, l’endroit appartient à tout le monde et ce n’est pas moi, « le français », qui vais commencer à m’attribuer les lieux. Mais quand même, il me semble que la rivière ne s’étend pas que sur 10 mètres carrés? D’ailleurs des vasques, il y en a tout le long…

Ils ont la force du nombre, alors après avoir abandonné d’essayer de profiter du coin et du calme environnants (enfin, en théorie) j’ai repris mon sac pour continuer le parcours et visiter les lieux. Et je dois le dire, j’ai été bien inspiré. Après la forte pente des escaliers, caché derrière les montagnes, de gros nuages bien chargés sont en approche. Après quelques clichés, j’ai pris le chemin du retour, retraversé le pont génois (avec l’envie de lâcher un rocher sur la famille en contrebas, mais bon, il faut savoir s’abstenir) direction la voiture. Une fois la porte fermée… les gouttes ont commencé à tomber.

C’est le sourire aux lèvres en pensant que mes colocataires de vasque allaient se tremper pour rejoindre la route  que j’ai pu rentrer après cette (toute de même) très bonne journée.

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Paglia Orba

Il fait partie des sommets mythiques de l’île. Si le Monte Cintu est le plus haut, le Paglia Orba est (avec le Monte Rutondu paraît-il) le plus beau. Et bien entendu une telle merveille se mérite et nous voilà bien loin de la gentille petite balade familiale du dimanche avec cette ascension. Cette randonnée est longue (huit heures pour le premier sommet et neuf en tout pour le second) et demande donc de l’endurance, un minimum d’équipement et l’absence totale de vertige. Sur la fin en effet, il y a quelques passages qui s’apparentent à de l’alpinisme. Voilà aussi pourquoi nous ne nous sommes pas aventurés seuls sur ce chemin très peu cairné sur les derniers passages, la présence et les conseils de notre guide Stéphane se sont révélés aussi agréables que nécessaires.

Le rendez-vous a été fixé au virage du fer à cheval, après Calacuccia en direction du col de Verghju à 7 heures 30. Rendez-vous matinal donc mais qui s’explique facilement par la longueur de la randonnée et le peu d’ombre sur le trajet. De plus, découvrir en arrivant sur le village de Calacuccia au détour d’un virage le Paglia Orba, Le monte Cintu et les Cinque Fratti dans la lumière du matin vaut bien de se lever un peu tôt, faites-en vous même l’expérience.

La première partie s’effectue sous les pins de la forêt de Valduniellu et très vite l’on rejoint une première bergerie où l’on peut trouver des boissons et du fromage. Une première passerelle enjambe ensuite le Golu qui naît plus haut dans le Niolu et que l’on suit durant tout cette portion où il hésite encore entre vasques, marmites et piscines. Pas de temps pour la baignade aujourd’hui mais nous y sommes retournés une autre fois pour une journée farniente à la rivière d’une tout autre nature…

Nous rencontrons par la suite les ruines d’autres bergeries, petite halte et nous repartons vers le refuge de Ciuttulu di i Mori, ça grimpe plus sec mais l’oeil du Tafunatu nous surveille et le Paglia Orba se détache sur la droite. C’est après le refuge que les choses se corsent (sans mauvais jeu de mots…). Le chemin sur la gauche conduit au Tafunatu, l’accès se fait par une vire très étroite et très dangereuse: elle a quelques morts à son actif… Nous nous contenterons d’admirer l’animal en grimpant sur le sommet en face. L’accès au Paglia Orba demande sur cette partie de l’attention, de la concentration, il faut s’aider des mains sur quelques passages et heureusement que le guide est là pour assurer les prises et le chemin à prendre. Le spectacle est grandiose et s’ouvre de Piana au phare de la Revelatta. Encore quelques raidillons à gravir et nous voilà parvenus au premier sommet. Quelques efforts de plus et un peu d’escalade pour le véritable sommet qui culmine à 2525 mètres d’altitude. Le point de vue sur le massif du Cintu vaut bien tous les efforts consentis. Dois-je vous dire que le panorama est splendide là haut? C’est le moment d’un pique- nique réconfortant en compagnie des chocards qui, en ce début de saison, semblent contents des reliefs de repas laissés par les randonneurs. Quel luxe que cette pause sur le toit de l’île, l’on se sent tout petit dans cet espace majestueux. Le temps d’en prendre plein les yeux et de se remettre en route par le même itinéraire avant de prendre une variante qui passe par le GR20 et qui surplombe la vallée par laquelle nous sommes montés avant l’arrivée au refuge. Une très belle journée, fatigante mais qui offre un instant d’éternité, bien précieux.